• le 25 septembre 2022

RENVERSEMENT RADICAL

Matthias HEMLINGER

Luc 16 ,19 – 31 ; 1 Tm 16, 10- 16

   Jésus souligne dans cette parabole que le Royaume de Dieu est un renversement complet de la condition humaine. Le riche est pauvre et le pauvre est riche. Ce renversement fonctionne dans les deux sens : les riches deviennent pauvres et les pauvres deviennent riches. Jésus a parlé plusieurs fois de ce renversement radical, radical dans les deux sens. Et il n’est pas le seul à en avoir parlé. Selon Abraham, Moïse et les prophètes en ont parlé. Dans l’évangile, la première personne à en parler, c’est Marie, chez Elisabeth. Elle dit : « les affamés, il les a comblés et les riches, il les a renvoyés les mains vides » Luc 1.53. L’apôtre Paul parle à Timothée de ce même renversement radical : les riches deviennent pauvres et les pauvres deviennent riches. Il en parle à Timothée et dans toutes les églises. 

   Jésus ajoute une deuxième chose à cette vérité : ce renversement est non seulement radical dans les deux sens, mais il est définitif, éternel, irrémédiable. Abraham dit au riche que ceux qui sont chez lui ne peuvent aller rejoindre le riche dans son lieu de souffrance et inversement, que ceux qui souffrent ne peuvent rejoindre Lazare, là où il est, avec Abraham. Autrement dit : dans le Royaume de Dieu, nos bons sentiments ne servent à rien et nos souffrances, si nous ne sommes pas dans ce Royaume, ne servent à rien non plus. Aucun changement n’est possible, même avec de la bonne volonté ou par la souffrance, parce que cela ne dépend plus de nous. 

   Résumons : Jésus, dans cette parabole parle d’un renversement de situation entre les riches et les pauvres, renversement qui est radical et définitif. Rien ne pourra plus être modifié à ce renversement.

   Dans le discours entre le riche qui est perdu à jamais et Abraham, il y a la demande qu’un mort ressuscite et vienne annoncer aux êtres humains sur la terre la vérité qui est maintenant révélée, la vérité ultime, définitive : il y a un renversement radical et éternel entre riches et pauvres. Abraham répond au riche qu’une résurrection ne servirait à rien pour convaincre les êtres humains sur la terre. Ils ont déjà Moïse et les prophètes. Ça suffit. Il ne peut rien y avoir de plus fort que Moïse et les prophètes. Rien, pas même une résurrection. Quand on réfléchit à cette réponse d’Abraham, on reste sans voix : nous oublions tellement vite la force qu’il y a dans l’Ecriture, dans Moïse et les prophètes. Satan connaît cette force. Longtemps, il a voulu empêcher la diffusion de la Bible. Comme beaucoup de croyants juifs et chrétiens y ont laissé leur vie, pour pouvoir la mettre à disposition de tous, il a perdu de ce côté-là. Alors il a trouvé une nouvelle stratégie : OK, je n’ai pas réussi à empêcher que la Bible soit mise entre toutes les mains, mais je vais faire en sorte que les êtres humains n’y prêtent pas attention. C’est le temps où nous vivons. Moïse et les prophètes sont à notre portée, mais nous ne nous y intéressons plus. 

   Donc Abraham répond au riche que Moïse et les prophètes, ça suffit pour être convaincu des réalités éternelles du Royaume de Dieu. Alors quelles sont ces réalités ? Que disent Moïse et les prophètes à ce sujet ? Eh bien ! justement, ils annoncent ce renversement de situation : les riches deviennent pauvres et les pauvres deviennent riches en Dieu. Moïse et les prophètes n’ont pas fait qu’annoncer ce renversement, ils l’ont vécu, incarné. Ils ont aussi annoncé qu’il y aura un Pauvre parmi les pauvres, le Christ, le Messie du Seigneur Dieu d’Israël. Il sera éliminé de la surface de la terre qui ne voudra pas de Lui, parce qu’il dérangera tellement qu’on le tuera. Sa pauvreté sera insupportable. Mais il ressuscitera aussi. Voyez ce que dit l’apôtre Paul de Moïse et des prophètes : « Dieu m’a accordé sa protection jusqu’à ce jour et je suis encore là pour apporter mon témoignage à tous, aux petits comme aux grands. Je n’affirme rien d’autre que ce que les prophètes et Moïse ont annoncé : à savoir que le Christ aurait à souffrir, qu’il serait le premier à ressusciter d’entre les morts et qu’il annoncerait la lumière à notre peuple et à toutes les Nations »Actes 26.22-23

   La demande du riche à Abraham que quelqu’un ressuscite des morts et vienne parler aux êtres humains sur la terre a déjà été exaucée. Moïse et les prophètes ont annoncé que le Christ du Seigneur serait mis à mort et viendrait après sa résurrection annoncer la lumière au peuple juif et aux Nations. C’est le temps que nous vivons. La parole des apôtres est la Parole du Christ ressuscité revenu sur terre. Ils annoncent la lumière, et c’est Jésus ressuscité qui, à travers eux, annonce la lumière. L’apôtre Paul parle à Timothée de cette lumière, c’est celle même de Dieu. Dieu habite une lumière inaccessible que nul être humain n’a vu, ni ne peut voir, et pourtant cette lumière est maintenant annoncée par le Christ ressuscité à travers ses apôtres. Pour que Timothée puisse, comme les apôtres, annoncer cette lumière à l’Eglise, il doit combattre le beau combat, garder le commandement. Pourquoi est-ce un combat ? Parce que, comme je l’ai dit, nous oublions vite la puissance de l’Ecriture sainte, Moïse et les prophètes. Si Paul dit à Timothée de combattre le beau combat et de garder le commandement, c’est qu’il y a un danger de laisser tomber, de se relâcher, de jeter l’éponge, dès que surviennent les épreuves à cause de la Parole, à cause de Moïse et des prophètes. 

Ce que Paul appelle « le commandement » dans sa lettre à Timothée, c’est la proclamation de la foi en Jésus-Christ. En Lui, en Jésus-Christ, les conditions des riches et des pauvres ont été complètement et définitivement renversées. Où voyons-nous cela ? Nous le voyons partout dans l’évangile, mais surtout dans le témoignage de Jésus devant Pilate, que Paul donne comme exemple à Timothée. Ce témoignage est le modèle de tout témoignage chrétien. Pourtant aucun apôtre n’a assisté au tête-à-tête qu’il y a eu entre Jésus et Pilate. Personne n’était là pour prendre des notes du témoignage de Jésus devant Pilate. Vous voyez que Dieu se débrouille pour nous faire connaître ce à quoi personne n’a pu assister, puisque le témoignage de Jésus devant Pilate nous est raconté en détails dans l’évangile. 

   Pilate, c’est un riche, un homme puissant qui a pouvoir de vie et de mort sur Jésus. Il le lui rappelle. Face à Pilate, il y a Jésus, un pauvre, pauvre car totalement à la merci de Pilate, complètement démuni, puisqu’il était attaché, il avait encore sur la figure les crachats des soldats, sur la tête une couronne de roi bouffon, mais qui le faisait énormément souffrir, puisque c’était une couronne d’épines, Jésus avait le corps meurtri, le dos en lambeaux après la flagellation. On ne peut imaginer un face à face plus contrasté entre deux personnes, l’une riche, l’autre pauvre. Et pourtant, qui est le riche ? Et qui est le pauvre ? Pilate ou Jésus ? Qui est celui qui sera aidé par Dieu –  car c’est ce que signifie le nom de Lazare : aide de Dieu, secouru par Dieu – ? Vous connaissez la réponse.

Eh bien, ce témoignage, Jésus tient à nous y faire participer. Il nous entraîne aujourd’hui à sa suite dans un témoignage coûteux, qui nous fera perdre tout ce que nous avons et ce que nous sommes, mais dans cette perte nous serons enrichis de la vie même de Dieu, nous serons enrichis de cette lumière que seul Dieu possède, la lumière de la vie. Jésus nous appelle à sa suite et cet appel est un combat permanent, un combat où il faut un tel héroïsme que nous nous découvrons bien incapables, bien pauvres. Tellement pauvres que nous ne pouvons que prier sans cesse : Seigneur, j’ai besoin de ton Esprit, j’ai besoin de la force de Ta résurrection. Sans elle je ne peux montrer au monde ce que tu as montré à Pilate avec tant de douceur alors même que tu subissais tant de violence : l’amour de Dieu notre Père qui veut nous communiquer la richesse de sa vie.

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