• le 5 décembre 2021

LE MINISTÈRE DU FILS DE ZACHARIE

Matthias HELMLINGER

Luc 3.1-6  (Psaume 126, Baruch 5.1-9 ; Philippiens 1.4-11)

Nous avons dans ce texte des indications historiques très précises. Elles sont réellement impressionnantes par leur abondance : « l’an quinze du règne de l’empereur Tibère, Ponce Pilate étant gouverneur de la Judée, Hérode étant alors au pouvoir en Galilée, son frère Philippe, dans le pays d’Iturée et de Traconitide, Lysanias en Abilène, sous le pontificat des grands prêtres étant Hanne et Caïphe… »

Luc veut nous raconter un vrai évangile, un vrai Jésus, pas un Jésus sorti de l’imagination des croyants. Il veut nous raconter le Jésus qui a réellement vécu à une époque historique très précise. Voilà pourquoi il donne autant de noms même ceux des rois qui gouvernent en-dehors de la région où Jésus a directement vécu, la Galilée et la Judée. Jésus n’a fait que quelques rares incursions dans ces régions limitrophes, et pourtant le nom des rois de ces régions est mentionné. Tout cela nous indique que le salut de Dieu, la gloire de Dieu est venue jusqu’à nous, non pas dans un temps mythique, comme dans les contes, mais réellement, dans un temps historique, il y a deux mille ans environ. 

On peut donc dire que, si Dieu est entré dans le temps, dans l’histoire que nous connaissons encore aujourd’hui, dans les événements et la politique qui font l’histoire des nations, ce sont aussi les événements et l’histoire qui sont entrés en Dieu. Aujourd’hui encore, Jésus porte dans le ciel, dans l’éternité, la marque des clous avec lesquels on l’a attaché sur la croix, il y a deux mille ans, sous le gouvernement de Ponce Pilate. Les événements de notre histoire sont entrés en Dieu. Et encore aujourd’hui, ce que nous vivons dans notre chair, dans le temps de notre vie sur terre, cela aussi entre en Dieu. Les trous dans les mains et les pieds de Jésus proviennent du temps que nous vivons actuellement, ils lui ont été faits par des clous qu’on lui a enfoncés dans la chair sous le gouvernement de Ponce Pilate, il y a deux mille ans. Dieu assume les événements, alors même qu’il vient en étant à la merci des événements de ce monde. Dans le monde actuel où nous vivons, presque chaque semaine on apprend qu’il y a une nouvelle guerre quelque part dans le monde, un nouveau pays d’où les gens doivent s’enfuir par centaines de milliers. Mais ne croyons pas que Dieu ne se laisse pas impacter par ces événements. Ne croyons pas qu’il n’est pas touché par tout ce qui se passe. 

Nous sommes entrés depuis dimanche dernier dans le temps liturgique de l’Avent. « Avent » est l’abréviation du mot Avènement. Pour l’Eglise qui prie, c’est réellement le début de l’année. En effet, l’Eglise estime que le salut du monde a commencé depuis que le Seigneur Jésus est venu sur terre dans la vierge Marie, dans le baptême qu’il a choisi de prendre sous la main de Jean-Baptiste. Encore aujourd’hui Jésus vient partout où il y a des gens qui gardent sa Parole. Il viendra une dernière fois, et ce sera soudain, fulgurant, comme un éclair qui illuminera tout, d’un bout à l’autre du monde. Quand on a demandé à Jésus à quel endroit sur terre aura lieu sa venue en gloire, il a répondu de façon énigmatique: « là où sera le cadavre, là se rassembleront les vautours » Lc 17.37. J’interprète aujourd’hui ce verset dans le sens que Lui, Jésus, viendra du ciel, comme un vautour vient du ciel, et il viendra dire le dernier mot à notre civilisation mondialisée, lorsque celle-ci aura amené ce monde à une décomposition complète, à l’état de cadavre. 

Puisque nous savons que Jésus apportera le dernier mot de l’histoire humaine, le dernier mot de l’histoire de chaque personne et le dernier mot de l’histoire des Nations, nous nous saisissons aujourd’hui de tous les mots, de toutes les paroles qu’il a prononcées pour le temps actuel, pour ce temps où nous marchons par la foi et non par la vue. Car les paroles de Jésus sont éternelles. Elles ne sont pas éternelles dans le sens que nous devons attendre la fin du monde pour y croire, mais éternelles dans le sens que nous devons nous en nourrir aujourd’hui, les vivre aujourd’hui. C’est aujourd’hui que les paroles éternelles de Jésus veulent porter en nous et par nous du fruit, apporter l’amour et le salut de Dieu à tous. Luc dit bien : « toute chair verra le salut de Dieu » Lc 3.6

L’apôtre Paul écrit aux chrétiens de Philippes qu’il prie pour eux très fidèlement. Et qu’est-ce qu’il demande dans ses prières ? Il demande à Dieu que l’amour grandisse de plus en plus chez ces chrétiens de Philippes, qu’ils aient une connaissance de plus en plus complète et une compréhension de plus en plus parfaite,  pour qu’ils soient capables de discerner ce qui est important pour leur vie dans le monde actuel. Car l’objectif est qu’ils soient purs et irréprochables au jour de la venue du Christ Ph 1.9-11. L’objectif de ceux qui ont cru en Jésus-Christ est d’être comblés d’une vie conforme à la volonté de Dieu, vie qui nous est précisément donnée par Jésus Christ. Pourquoi Jésus est-il venu demander le baptême à Jean-Baptiste ? C’est un baptême de conversion pour le pardon des péchés. En avait-il besoin ? « Se convertir » a plusieurs sens en français. Parfois il veut dire changer de métier. C’est un peu cela, que ça signifie dans la Bible : nous changeons de métier, nous changeons de patron, quand nous nous convertissons. Au lieu de travailler pour le diable, on travaille pour Dieu. Nos actions ne sont plus les mêmes, nous avons reçu le pardon de nos péchés. Nous vivons et agissons autrement. En hébreu, « se convertir » signifie « revenir, retourner ». Le verbe est employé 1054 fois dans la Bible, et, ce qui est bizarre, il est aussi employé pour Dieu. Nous l’avons entendu dans le Psaume 126 au début de ce culte : le Seigneur revient avec la captivité. Il revient avec les Juifs qui étaient captifs des Babyloniens. Il y a une conversion de Dieu, qui revient de Babylone à Jérusalem avec les déportés juifs. Les Juifs devaient travailler pour les Babyloniens. Et les Babyloniens comme tous les peuples faisaient de grandes fêtes nationales pour leur dieu. Leur dieu s’appellait Mardouk. Les déportés juifs devaient alors travailler à améliorer les routes du royaume de Babylone, pour préparer cette fête nationale : combler les trous, raser des bosses. Un travail de forçat pour un dieu qui avait visiblement vaincu le Dieu d’Israël, puisque les Babyloniens avaient détruit le temple de Jérusalem, ce temple que le Dieu d’Israël avait choisi pour y faire résider son Nom. Quelle humiliation : travailler pour celui qui a détruit tout ce qui constituait votre foi ! Mais le Dieu d’Israël était avec son peuple dans cette humiliation. Il garde la main sur l’histoire d’Israël, sur l’histoire de Babylone, sur l’histoire des Nations. Quand il décide de revenir à Jérusalem, de revenir dans son temple détruit, les Juifs le suivent : c’est le Seigneur qui ouvre la route, qui aplanit les collines, qui comble les ravins. Le Seigneur se convertit et son peuple Le suit. Les obstacles qui étaient insurmontables ne le sont plus. Qui peut résister à la conversion du Seigneur ? Qui peut résister à ce Dieu qui est présent dans son peuple humilié et qui se convertit, c’est-à-dire revient à Jérusalem? La puissance de la conversion du Seigneur laisse pantoises les Nations. Nous l’avons entendu dans le Psaume126 : les Nations disent « le Seigneur a fait grand avec ceux-là ! ». Et Israël répète, reprend les paroles qu’il a entendues de la bouche même des Nations: « oui, le Seigneur a fait grand avec nous ! ». Un jour, tous les antisémites, tous ceux qui se sont moqués des Juifs humiliés, tous ceux qui parmi les chrétiens disent que les Juifs n’ont plus de Dieu qui leur reste fidèle, un jour, tous ces gens diront : « le Seigneur a fait grand avec ceux-là ! ». Je me suis souvent demandé pourquoi Marie dit, en louant le Seigneur lorsqu’elle est chez Elisabeth : « le Seigneur a regardé l’humiliation de sa servante .. le Dieu Puissant a fait pour moi de grandes choses…» Luc 1.48. Marie est une toute jeune fille, quelle humiliation a-t-elle déjà vécue ? Je pense qu’il s’agit de l’humiliation du peuple d’Israël dont elle est solidaire. Ce peuple d’Israël était occupé par les Romains, comme nous l’avons entendu dans l’évangile de ce dimanche. Mais le Seigneur a fait grand, il est revenu de l’humiliation avec son peuple, il nous conduit vers la ville, le temple où il a choisi de faire résider son Nom à tout jamais. Qui peut résister à la conversion du Seigneur ? La Bible est pleine d’appels à la conversion que le peuple d’Israël, dans son ensemble, n’a pas voulu écouter, les Nations non plus. Mais il y a toujours une petite partie qui écoute, qui se convertit. Ce sont ceux qui comprennent qu’il ne faut pas laisser passer cette chance, quand le Seigneur revient vers nous. Il est le premier à revenir vers l’être humain. Il attend à la porte de notre cœur. Nous avons souvent le sentiment que nous attendons le Seigneur. Si nous savions ! Si nous savions combien Lui nous attend ! Il ne cesse jamais de nous attendre. Le Roi s’est fait serviteur. 

Quand nous répondons à l’appel à suivre le Seigneur dans Sa conversion, nous sommes entraînés loin en avant, très haut aussi. Jésus se joint au peuple de pécheurs qui demande à Jean-Baptiste le baptême de conversion parce qu’il se convertit sans cesse à la volonté de son Père, jusqu’à rejoindre Son Père avec son corps humain. Jésus nous entraîne dans sa conversion incessante vers le Père, dans sa vie tout entière orientée vers l’accomplissement de la volonté de salut de son Père. L’aboutissement est la gloire de Dieu. Est-ce que notre conversion peut être un échec, quand nous nous laissons entraîner par la conversion de Jésus ? Non ! Jésus a réussi, pour nous tous, son chemin de conversion. Il est désormais auprès du Père et il nous communique cette puissance de conversion par le Saint-Esprit. C’est le Saint-Esprit qui opère en nous le changement. L’apôtre Paul dit bien qu’il prie pour les Philippiens afin qu’ils soient purs et irréprochables pour le jour du Christ Ph 1.10. Ce dernier adjectif  « irréprochable » est la traduction du grec « aproskopos ». Ce mot grec désigne aussi un chemin qui n’a encore jamais été exploré. Jésus dans sa conversion vers le Père, jusqu’à la mort, jusqu’à la résurrection, nous entraîne dans un chemin encore jamais exploré, que nous ne pouvons imaginer à l’avance. 

C’est le chemin de la gloire de Dieu, gloire qui est venue vers nous et vers laquelle nous allons. Luc mentionne une prophétie d’Esaïe pour expliquer le baptême de Jean-Baptiste. Esaïe a dit : « et la gloire de Dieu sera révélée (mise à nue) et toute chair ensemble verra que la bouche du Seigneur a parlé (ou : verront ce que la bouche du Seigneur a parlé) » Es 40.5. ça, c’est le texte hébreu. Mais la traduction grecque a légèrement changé la prophétie, elle dit : « toute chair verra le salut de Dieu ». Elle fait donc un lien entre la gloire de Dieu et le salut de Dieu. La gloire de Dieu, c’est que nous soyons sauvés. La gloire de Dieu, ce n’est pas que les êtres humains se perdent. Suivons donc le mouvement de conversion de Jésus, qu’il nous indique depuis son baptême : il va toujours vers le Père, chaque jour il fait la volonté de son Père et finalement, il rejoint le Père dans sa gloire, sans craindre la mort. Tout cela, il l’a fait pour pouvoir nous entraîner à sa suite. De même, notre conversion cherchera à entraîner d’autres à la suite de Jésus. 

Dieu désire partager sa gloire avec nous. Les Juifs exilés à Babylone ne s’imaginaient certainement pas pouvoir un jour revoir cette gloire de Dieu qui résidait avec eux dans le temple de Jérusalem. Mais cela a eu lieu. 

Nous sommes aujourd’hui l’avant-dernier jour de Hanoukah. C’est une fête où les Juifs ont vu la gloire de Dieu. Les Grecs avaient interdit le culte dans le temple de Jérusalem, il n’y avait plus l’huile spéciale pour illuminer le temple. Alors un miracle s’est produit : la petite fiole d’huile qui ne devait durer qu’un jour, a duré sept jours, le temps qu’on fabrique à nouveau cette huile spéciale. Ce miracle de Hanoukah, Jésus l’a commentée. Il a dit : « je suis la lumière du monde, celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais il aura la lumière qui conduit à la vie » Jn 8.12, et il est revenu plusieurs fois sur cette affirmation, qu’il est la lumière allumée dans ce monde, qui ne s’éteindra jamais. Les ténèbres peuvent aller en augmentant et nous vivrons peut-être des temps encore plus durs qu’actuellement. Déjà en deux ans, depuis le début de l’épidémie, nous sommes passés de 240 millions de chrétiens persécutés à 340 millions dans le monde. Cent millions de plus ! La foi chrétienne est de plus en plus impossible à vivre, mais elle continuera, et la persécution n’empêche pas qu’elle continue, car la lumière qu’est Jésus brille dans les ténèbres. Dieu veut nous faire partager sa gloire. Nous l’avons entendu dans le texte de Baruch : Jérusalem est invitée à quitter sa robe de tristesse et de misère, et à revêtir pour toujours la belle parure de la gloire de Dieu

Jésus n’est pas venu seulement enlever nos péchés et les porter lui-même. Il est venu nous partager la gloire de Dieu son Père. Quand Dieu a créé Adam et Eve, bien vite le serpent leur a fait croire que Dieu a peur que les êtres humains soient comme Lui. C’est évidemment faux. Le Seigneur Dieu avait mis dans le jardin d’Eden l’arbre de vie, dont Adam et Eve pouvaient manger pour vivre éternellement comme Dieu. Mais Adam et Eve ont mis en doute la parole de Dieu et depuis, nous sommes formatés pour croire le mensonge. Laissons la Parole de Jésus, la vie de Jésus venir nous entraîner dans un mouvement de conversion qui nous fait écouter la Parole de Dieu, la vraie Parole, celle qui n’est pas déformée par le serpent : il y a maintenant sur cette terre l’arbre de vie, c’est le bois de la croix où Jésus est allé pour nous, pour nous convertir à son amour pour le Père et nous démontrer que le Père nous aime depuis toute éternité. Jésus serait-il venu sur terre, même si nous n’avions pas péché ? Oui, car ce fut toujours l’intention du Père que nous fassions la connaissance de son Fils en qui nous sommes aimés en tant que fils de toute éternité. Amen.

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