• le 8 août 2021

JÉSUS, LE PAIN DE VIE

Texte de Matthias HELMLINGER, dit par Alain NADAL

Jn 6, 41-51   

   Nous pensons avoir fait le tour de qui est Jésus. Nous pensons le connaître. C’est l’obstacle le plus grave pour la foi. Les contemporains de Jésus pensaient qu’ils connaissaient Jésus, puisqu’ils vivaient avec lui. Et ce fut le principal obstacle pour leur foi. Ils connaissaient son père et sa mère. Ils connaissaient même le nom de son père : Joseph. Pour eux, Jésus était quelqu’un de familier.

  De même, après deux mille ans de christianisme, Jésus est devenu quelqu’un de connu. Tout le monde a une idée sur lui : Pour les chrétiens, il est le Fils de Dieu ; pour les musulmans, c’est un prophète. 

   Mais cette connaissance même est un obstacle à la foi, quand Jésus se met à parler. Il dit qu’il est le pain descendu du ciel, le pain qui, aujourd’hui même, descend du ciel. Il dit qu’il est ce pain, qu’il est le Vivant. 

  « Le Vivant » est un titre réservé exclusivement au Seigneur Dieu d’Israël dans tout l’A.T. Dans l’A.T., le Dieu d’Israël est sans cesse appelé « le Vivant », par opposition aux idoles, aux dieux inventés par les hommes, des dieux qui sont morts et inertes. 

   Au verset 51, Jésus se présente d’une manière surprenante : « je suis le pain vivant descendu du ciel ». Les Galiléens, qui le connaissent depuis trente ans, ne comprennent pas qu’il dise être descendu du ciel. Pour eux, il est le fils de Joseph et de Marie. Or, c’est ce Jésus tout humain qui se dit le Vivant, le Dieu d’Israël descendu du ciel, en tant que pain qui donne la vie. 

   Nous avons aujourd’hui les mêmes difficultés à croire en Jésus qui se dit être le Pain, le Vivant descendant encore aujourd’hui du ciel, un pain qu’il nous faut manger. 

  Si nous interrogeons les protestants sur Jésus pain de vie, la plupart parleront d’un « symbole », d’un « langage symbolique ». Plus loin dans son enseignement, au verset 56 de notre chapitre, Jésus nous interdit de penser ainsi. En effet, il dit qu’il nous faut « manger sa chair et boire son sang ». Là encore, il provoque des interrogations. Jésus est le pain qui descend du ciel, et nous avons besoin de véritablement le manger, sans quoi il n’y a pas de vie éternelle, pas de résurrection. Jésus insiste, insiste, et insiste encore sur le fait qu’il nous faut manger ce pain descendu du ciel, ce pain qu’il est, lui ; sans quoi, il n’y a pas d’espérance de résurrection. : « Celui qui mange ma chair et qui boit mon sang a la vie éternelle, et je le ressusciterai au dernier jour. Car ma chair est vraiment une nourriture et mon sang est vraiment un breuvage. Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui » (Jn 6,54-56).

   La Bible ne passe pas sous silence l’incrédulité des Hébreux, ni l’incrédulité des disciples de Jésus. Sans cesse, les paroles de Dieu ont rencontré l’incrédulité dans l’histoire du peuple hébreu. Le peuple des Hébreux a été nourri par la manne pendant quarante ans. Tous les jours, elle tombait  du ciel, et ne pouvait être conservée d’un jour à l’autre, sauf la veille de Sabbat, où elle recevait cette qualité supplémentaire de se conserver pour le jour suivant. 

   Cette nourriture céleste fut une épreuve pour les Hébreux. Ils ont murmuré contre Dieu. C’est ce qui se passe aujourd’hui encore : le vrai pain descend du ciel,  mais on murmure contre Jésus. Quand nous sommes incrédules devant les paroles de Jésus qui nous invite à manger sa chair, prenons conscience que cette incrédulité est déjà dénoncée dans notre texte  Jésus dit : « ne murmurez pas entre vous » (v. 43). Il le dit à des auditeurs qui sont en train de parler entre eux. Ils ne parlent pas à Jésus. Mais Jésus leur répond, alors qu’ils ne lui ont pas adressé leurs murmures. 

   De même, depuis deux mille ans, les théologiens discutent entre eux de Jésus, de la Sainte-Cène. Même les réformateurs Martin Luther et Jean Calvin ne sont pas tombés d’accord là-dessus. Et que se passerait-t-il si Jésus intervenait directement dans les discussions que nous avons à son sujet ? N’arrive-t-il pas souvent que nous passons notre temps à discuter sur les textes bibliques, et que cela est parfois un bon moyen pour ne pas écouter Jésus, qui assiste pourtant à cette discussion depuis le ciel où il se trouve maintenant ? 

   Prions pour que Jésus nous parle directement, au lieu de « murmurer » entre nous sur ce que nous n’avons pas compris de ses paroles. 

   Devant l’incrédulité de ses auditeurs face à ses paroles, Jésus leur dit : « ne murmurez pas entre vous. » 

  D’habitude, ce sont les enfants qui entendent une telle phrase de leurs parents : « ne murmurez pas ». Nous sommes bien les enfants de Jésus, les enfants de son Père, et c’est parce qu’il nous entraîne dans la même filiation qu’il possède de toute éternité, que Jésus nous dit : « ne murmurez pas ». Il sait très bien que c’est impossible pour nous de croire aux paroles qu’il nous adresse. Et il indique la solution : le Père nous enseigne directement pour que nous venions à Jésus : « Quiconque a entendu le Père et reçu son enseignement vient à moi » (v. 45b)

   Un espace a été ouvert au plus profond de chaque être humain par la venue de Jésus, un espace où le Père enseigne directement ses enfants pour qu’ils viennent à Jésus, qu’ils viennent l’écouter, aussi incroyables que paraissent ses paroles. Ce sont les prophètes qui avaient annoncé cet enseignement universel de Dieu, directement dans le cœur de chaque être humain. 

   Vous aurez remarqué dans le texte d’aujourd’hui l’insistance sur l’universalité de la révélation : « Ilsseront tous enseignés de Dieu » (v.45), « Quiconque a entendu le Père et reçu son enseignement vient à moi » (v.45), « celui qui croit a la vie éternelle » (v.47) : « celui », donc n’importe qui), « si quelquun mange de ce pain, il ne meurt pas » (v.50) : « quelqu’un » donc n’importe qui), « si quelquun mange de ce pain, il vivra pour l’éternité » (v.51). 

   Les mots « tous »,  « quiconque », « celui », « quelqu’un » soulignent l’universalité du salut. Le pain qu’est Jésus, le pain qui fait vivre, sans que la mort puisse arrêter cette vie, ce pain est pour tous. Vraiment pour tous. Dieu ne sélectionne pas les destinataires. Il n’y a pas les méritants d’un côté, et les non-méritants de l’autre. Tous seront enseignés par le Père pour qu’ils viennent à Jésus et puissent recevoir qui Il est : le Pain descendant du ciel, le Dieu vivant lui-même. 

   Cette heure est arrivée. Tous sont enseignés par le Père, et pourtant il y a des murmures. Il y a même de nombreux disciples qui quitteront Jésus ce jour-là (v.60), à cause de son enseignement, à cause de ce qu’il a dit sur le pain de vie. Ces murmures, ces défections nous sont racontées pour nous éviter de faire comme eux : partir. Jésus dit : « ne murmurez pas ». Il nous encourage à continuer à écouter ce qu’il dit de lui-même, car le Père est à l’œuvre au fond de nous-mêmes, pour que nous restions là, près à écouter Jésus, aussi incroyables que nous paraissent ses paroles. 

   Lorsque nous sommes prêts à écouter Jésus, il se produit un miracle : Quand nous entrons dans les paroles de Jésus, nous devenons comme lui :  c’est-à-dire, du pain qui fait vivre les autres. 

   Le jour de la multiplication des pains, Jésus a demandé aux disciples de ramasser les morceaux qui restaient, après que toutes les personnes présentes aient mangé à satiété. Ils ont rempli 12 corbeilles avec ce surplus. Douze, c’est le nombre du peuple de Dieu. Nous devenons ce peuple de Dieu, nous devenons le pain qui reste pour la nourriture du monde. C’est à cela que chaque chrétien est destiné : être comme Jésus. Or, Jésus est le Pain de vie. On peut dire sans se tromper, que le but de notre vie est de devenir le pain de vie. Seul Dieu peut faire cela et c’est justement ce qu’il est en train de faire, depuis que Jésus est venu.

   Immédiatement après avoir mangé des pains et des poissons à satiété, la foule s’est retrouvée toute seule. Jésus s’est retiré dans la montagne. Mais les 12 corbeilles pleines de morceaux de pain en trop sont restées là. Ces corbeilles, c’est nous, c’est l’Eglise. Jésus est auprès de son Père, mais nous avons à être nous-mêmes la nourriture pour les foules.

   Tout cela peut sembler bien mystérieux ! C’est effectivement mystérieux si nous restons en-dehors de Jésus, si nous restons loin de lui. Mais tout devient lumineux, quand nous entrons, quand nous venons dans le mystère qu’est Jésus. 

   La Bible est remplie de mystères, elle est remplie de merveilles qui échappent à notre entendement. Les mystères de la Bible me sont racontés, non pas pour que quelqu’un vienne me les expliquer, mais pour que je m’y implique. D’ailleurs, Jésus est le premier à s’impliquer totalement dans ses paroles. 

   Après la multiplication des pains, la foule voulait le couronner, mais Jésus s’est enfui dans la montagne, seul. Jésus ne se laisse pas couronner par notre enthousiasme devant les miracles, il ne se laisse pas couronner par notre amour si facile quand on a le ventre plein. Par contre, il acceptera d’être couronné par les soldats romains, après qu’il se soit livré lui-même entre leurs mains. Il se laisse couronner par notre mépris et notre haine. C’est une couronne d’épines qui lui fait verser son sang. C’est ainsi qu’il nous est donné de manger sa chair et de boire son sang : Jésus vient au cœur de notre opposition existentielle à la vie de Dieu en nous. 

   Si quelqu’un dit « oui » à Jésus, c’est qu’il a été attiré par le Père. Sinon, nous n’aurions même pas la liberté de dire « oui » à Jésus. Nous sommes attirés par le Père vers son Fils ; mais cette attirance n’est pas une contrainte. Car Dieu, notre Père, est le véritable créateur de notre liberté. Venir à Jésus, c’est une question d’amour. Et c’est cet amour que nous pouvons donner aux autres pour qu’ils en vivent eux aussi. Être pain pour les autres, c’est concrètement parler aux autres comme Jésus a parlé, c’est agir pour les autres comme Jésus a agi. Être pain pour les autres, c’est être la bouche et les mains de Jésus pour les autres. Parfois, c’est juste exister. Exister, être présent aux autres, alors qu’on aurait envie de fuir, de s’isoler. 

   Partout où l’évangile progresse aujourd’hui, il y a des chrétiens persécutés. En Erythrée, en Inde, en Iran, en Chine et dans beaucoup d’autres pays où il est très risqué et dangereux d’être chrétien, l’évangile progresse. Pourquoi ? Parce que les chrétiens parlent et agissent par amour, à cause de Jésus. 

   En Jésus, ils sont le pain donné pour la vie du monde.

  C’est ce que le Père veut encore enseigner à beaucoup d’êtres humains : ils sont ses fils en Jésus-Christ. 

Amen.

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