• le 18 juin 2023

ENTENDRE LA VOIX DE DIEU

Job 33, 14-16  (Segond 21) : « Dieu parle tantôt d’une manière, tantôt d’une autre, et on ne le remarque pas. Il parle par des rêves, par des visions nocturnes, quand un sommeil profond tombe sur les hommes, quand ils sont endormis sur leur lit. Il leur communique alors son message et confirme les avertissements qu’il leur donne ».

   Lorsqu’un chrétien né de nouveau pense à Dieu, la première pensée qui lui vient à l’esprit, c’est : Dieu est amour (1 Jn 4,8). Pour lui, la preuve la plus éclatante de cet amour est le sacrifice de Jésus à la Croix, ce sacrifice unique et parfait qui nous libère de l’esclavage du péché et nous réconcilie avec Dieu. 

   Dans le même mouvement de pensée, le chrétien peut affirmer aussi que « Dieu est Esprit », comme le dit Jean (Jn 4,24). Ce même chrétien sait aussi que Dieu est saint, il peut tout, il sait tout, il est présent en tous lieux en même temps, parce qu’il est Esprit.

   On retrouve tous ces attributs de Dieu dans les textes bibliques, Ancien Testament, comme Nouveau Testament.

   Si Dieu était tout cela, mais rien que cela, ce serait déjà énorme ; il serait déjà digne d’être adoré. Mais il manquerait une chose essentielle pour les hommes qu’il a créés, pour les chrétiens, bien sûr, mais aussi pour les non-chrétiens qui se convertiront un jour. Quelle est cette chose ? Les hommes ont besoin de parler à leur Créateur,  et de savoir qu’Il les écoute. Mais aussi et surtout, ils ont besoin de l’entendre parler. Ils ont besoin d’entendre sa voix. Eh bien, c’est ce que Dieu a toujours fait, depuis la Création.

   L’apôtre Jean le dit dès les premiers mots de son évangile : « Au commencement était la Parole, et la parole était avec Dieu, et la Parole était Dieu » (Jn 1,1). 

  Ce qui différencie notre Dieu des faux dieux, c’est-à-dire des idoles devant lesquels se sont prosternés, et se prosternent encore tant d’hommes, c’est que notre Dieu parle à ses créatures. Pourquoi ? Parce qu’il veut se révéler à elles, il veut se faire comprendre d’elles, les guider, les prévenir des dangers, les conseiller dans leur vie de tous les jours.

   Le psalmiste décrit bien la différence entre notre Dieu et les idoles : « Leurs idoles sont de l’argent et de l’or, œuvre de la main des hommes. Elles ont une bouche et ne parlent pas, elles ont des yeux et ne voient pas, elles ont des oreilles et n’entendent pas » (Ps 115, 4-6). Voir aussi Es 44,9-20.

   Notre Dieu, lui, voit et entend, et il a toujours parlé aux hommes. On le voit dès le Jardin d’Éden : « L’Éternel Dieu donna ce commandement à l’homme : Tu pourras manger de tous les arbres du jardin ; mais tu ne mangeras as de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, car le jour où tu en mangeras, tu mourras » (Gn 2,16-17). Ce qui m’intéresse aujourd’hui, ce n’est pas la teneur du commandement. C’est le fait que Dieu a bien parlé à Adam, en lui donnant ce commandement, et qu’Adam a bien entendu Dieu lui parler.

  Je ne vais pas citer tous les hommes de l’Ancienne Alliance à qui Dieu a parlé ; la liste serait trop longue. Je veux seulement mentionner Caïn, Noé, Abram, Moïse, Josué, tous les prophètes et certains rois. On ne peut donc pas dire que la parole de Dieu a été rare avant la venue de Jésus !

   À propos de Moïse, il nous est dit : « Moïse parlait, et Dieu lui répondait à haute voix » (Ex 19,19). Lorsque Jérémie témoigne de l’appel que Dieu lui a adressé, voilà ce qu’il dit : « La parole de l’Éternel me fut adressé en ces mots : Avant que je ne te forme dans le  ventre de ta mère, je te connaissais, et avant que tu ne sortes de son sein, je t’avais consacré, je t’avais établi prophète pour les nations. 

   Je répondis  : Ah ! Seigneur Éternel ! Je ne sais point parler, car je suis un jeune garçon. 

   Et l’Éternel me dit : Ne dis pas : Je suis un jeune garçon. Car tu iras vers tous ceux contre qui je t’enverrai, et tu déclareras tout ce que t’ordonnerai ; ne les crains pas, car je suis avec toi pour te délivrer » (Jr 1,4-8).

   Nombreux sont les chrétiens qui se demandent, sans oser en parler, si les  dialogues rapportés dans l’AT entre Dieu et les hommes, se sont réellement passés tels qu’ils nous sont décrits ; à savoir des paroles de Dieu audibles ou compréhensibles pour les hommes auxquels il s’adressait, au point que ces hommes pouvaient répondre à Dieu.

   Nos contemporains ont du mal à imaginer que Dieu puisse tenir une conversation, j’ai envie de dire une conversation « classique », avec ses créatures, c’est-à-dire comme on parle à son père ou à un ami, même si, bien sûr, l’homme ne voit pas Dieu, mais l’entend seulement.

   Frères et sœurs, s’il subsiste un doute dans notre esprit, posons-nous cette question : Qu’est-ce qui est le plus facile pour Dieu : Faire en sorte que les hommes puissent l’entendre parler, ou bien permettre à son peuple de traverser la Mer des Joncs à pied sec pour échapper à l’armée de Pharaon ? (Ex 14,21-31).

   Ce qui est un peu moins difficile à admettre pour notre esprit rationnel, ce sont les visions et les rêves grâce auxquels Dieu a souvent parlé aux hommes. C’est le cas, entre autre, du prophète Esaîe qui raconte la vision qu’il a eue au moment de sa vocation. Nous trouvons ce texte dans Es 6,1-13. Dans cette vision aussi, il y a un dialogue entre Dieu et son prophète. Lisez-la ou relisez-la si vous l’avez oubliée.

   Je voudrais essayer de répondre au scepticisme ou aux doutes que ces dialogues peu communs engendrent peut-être en nous. Ce sont les textes bibliques qui vont nous permettre d’y voir clair et de dissiper nos doutes, si nous en avons.

   Demandons-nous d’abord : Qui parle, lorsqu’un homme perçoit que Dieu lui parle ? La réponse est précise et biblique : C’est l’Esprit-Saint. Voici ce qu’écrit l’apôtre Jean dans son Évangile. Peu avant son arrestation et sa condamnation, Jésus dit à ses disciples : « J’ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais vous ne pouvez pas les comprendre maintenant. Quand il sera venu, lui, l’Esprit de vérité, il vous conduira dans toute la vérité ; car ses paroles ne viendront pas de lui-même, mais il parlera de tout ce qu’il aura entendu et vous annoncera les choses à venir. Lui me glorifiera, parce qu’il prendra de ce qui est à moi et vous l’annoncera. Tout ce que le Père a est à moi ; c’est pourquoi j’ai dit qu’il prendra ce qui est à moi, et vous l’annoncera » (Jn16, 12,15).

   Nous voyons que Jésus insiste pour nous faire comprendre que l’Esprit-Saint parlera effectivement aux hommes, à tous les hommes nés de nouveau, quand le moment sera venu. 

   Pourquoi cette restriction : Quand le moment sera venu ?

   Parce que Jésus le dit clairement dans un autre passage de l’évangile de Jean : « Le dernier jour, le grand jour de la fête (Soukkoth), Jésus debout s’écria : « Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi et qu’il boive. Celui qui croit en mon nom, des fleuves d’au vive couleront de son sein, comme dit l’Écriture. Jésus dit cela de l’Esprit qu’allaient recevoir ceux qui croiraient en Lui ; car l’Esprit n’était pas encore donné, parce que Jésus n’avait pas encore été glorifié » (Jn 7,37-39).

   Cela veut-il dire qu’avant que Jésus ait été glorifié, c’est-à dire avant qu’il soit remonté vers son Père, (après sa résurrection et son ascension), l’Esprit n’était pas donné aux hommes ?

   Non ! L’Esprit a toujours existé et a toujours été présent. Mais dans l’Ancienne Alliance, il n’était donné qu’à certains hommes choisis par Dieu, comme ceux que j’ai nommés plus haut. 

   Un texte comme Nb 11,17 et 25 nous fait comprendre comment, et à qui Dieu accordait l’Esprit : « L’Éternel dit à Moïse : « Rassemble auprès de moi 70 des anciens d’Israël… Amène-les à la tente de la Rencontre et qu’ils s’y tiennent debout avec toi. Je descendrai, et là je te parlerai. Je prendrai de l’Esprit qui est sur toi, et je le mettrai sur eux afin qu’ils portent avec toi la charge du peuple, et que tu ne la portes pas à toi seul ». Et le v. 25 précise : « L’Éternel parla à Moïse ; il prit de l’Esprit qui était sur lui et le mit sur les 70 anciens. Et dès que l’Esprit reposa sur eux, ils se mirent à prophétiser, mais ils ne continuèrent pas ».

   Dieu avait choisi Moïse pour le remplir de son Esprit, en permanence. Les 70 anciens, eux, ont reçu une part de l’Esprit qui était sur Moïse, mais  cette onction était temporaire.

   Comprenons bien : Quand Dieu décide de former un peuple qui lui appartienne et qui lui soit fidèle, ce n’est pas un caprice de sa part. Son but, c’est ce qui est écrit dans le livre de Jérémie : « Je t’établis pour être la lumière des nations, pour que mon salut soit manifesté jusqu’aux extrémités de la terre » (Es 49,6).

   Comme tous les peuples, le peuple d’Israël avait besoin d’un chef qui le dirige, qui le conseille, qui lui montre ce qu’il faut faire et ne pas faire, bref, quelqu’un qui lui parle. Ce chef, c’est Dieu lui-même, et il a choisi des hommes comme Moïse, les prophètes et d’autres encore, pour parler aux hommes de sa part.

   Dans la Nouvelle Alliance, tout change : L’Esprit est donné à tous les hommes, en permanence, car la prophétie de Joël s’est accomplie, comme le déclare Pierre dans son discours, juste après l’effusion de l’Esprit, le jour de la Pentecôte : « Ces gens ne sont pas ivres comme vous le supposez… Mais c’est ce qui a été dit par le prophète Joël ; dans les derniers jours, dit Dieu, je répandrai mon Esprit sur toute chair ; vos fils et vos filles prophétiseront, vos jeunes gens auront des visions, et vos vieillards auront des songes. Oui, sur mes serviteurs et mes servantes, je répandrai mon Esprit ; et ils prophétiseront » (Act 2,15-18).

   C’est ainsi qu’on voit l’Esprit s’adresser au diacre Philippe, un homme comme vous et moi : « Lève-toi et va du côté du midi, sur le chemin qui descend de Jérusalem à Gaza » (Act 8,26). Philippe obéit et rencontre (pas par hasard) un Éthiopien à qui il annonce la bonne nouvelle de Jésus. Et cet homme est baptisé sur le champ.

   Sur le chemin de Damas, Saul entend la voix de Dieu : « Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ? » « Qui es-tu Seigneur ? » « Je suis Jésus que tu persécutes » (Act 9,4-5. 

   Peu de temps après, dans une vision, le Seigneur envoie Ananias auprès de Saul pour qu’il recouvre la vue et soit rempli d’Esprit-Saint. Là aussi, il y a un dialogue entre Dieu et Ananias, car ce dernier craignait de rencontrer Saul ; il savait en effet que Paul persécutait les chrétiens. Dieu le rassure, et il finit par obéir. (Act 9,10-19).

   Le Nouveau Testament nous montre l’exemple d’hommes qui n’étaient ni roi ni prophètes, qui pourtant ont dialogué avec Dieu.

   Dans le récit de la conversion de Corneille, par exemple, l’Esprit parle d’abord à ce centenier romain pour qu’il aille chercher Pierre qui se trouve à Jaffa, à une journée de marche. Et le lendemain, l’Esprit parle à Pierre dans une vision et lui demande d’aller chez Corneille. Et cela se termine par une effusion de l’Esprit sur tous ceux qui étaient présents chez Corneille. (Act 10,1-47).

   Mais, me direz-vous, ça, c’était il y a 2000 ans ! Qu’en est-il dans notre XXIe siècle ? À l’ère de l’intelligence artificielle, du Métavers (la réalité virtuelle), de Chat GPT, de l’exploration spatiale, des robots qui remplacent les aides soignantes dans les maisons de retraite ou les réceptionnistes à la réception des hôtels, Dieu a-t-il arrêté de parler aux hommes ? NON ! Le problème, c’est que beaucoup hommes ne veulent pas entendre, ils refusent de croire. Ils n’entendront rien, s’ils ne changent pas d’attitude.

   Pour ceux qui ont soif d’entendre Dieu, pour ceux qui ont soif de recevoir l’Esprit en plénitude, pour ceux qui veulent faire sa volonté, pour ceux qui veulent se laisser diriger par Lui, Dieu parle encore, aujourd’hui.

   Comment parle-t-il aujourd’hui

   Je vais laisser de côté les rêves et les visions par lesquels Dieu parle encore aujourd’hui. Je ne vais pas non plus mentionner les « paroles de connaissance », les « paroles de science » et les « paroles prophétiques » qui sont des dons de l’Esprit (1 Co 12,7-11), non pas que ces manifestations n’aient pas d’importance pour entendre la voix de Dieu, bien au contraire. Mais ce n’est pas le moyen dont Dieu se sert le plus souvent.  

   Le premier moyen que Dieu utilise pour parler aux hommes, c’est la Bible. Ce n’est pas un hasard si la Bible est appelée « Parole de Dieu ». Pendant longtemps, dans l’Ancienne Alliance, les hommes n’avaient pas le texte écrit de l’Ancien Testament. Ils avaient donc besoin que des hommes choisis par Dieu, comme les prophètes, leur parlent de la part de Dieu. C’est la raison pour laquelle, les prophètes commençaient toujours par dire : « Ainsi parle le Seigneur », lorsqu’ils parlaient au peuple de la part de Dieu.

   Aujourd’hui, chaque chrétien né de nouveau n’a plus besoin d’un prophète pour entendre Dieu lui parler : L’Esprit Saint qui est en lui (1 Co 3,16) lui parle à travers les textes bibliques qui justement ont été inspirés par l’Esprit.

   Le problème, c’est qu’à force de lire ces textes d’année en année, nous les connaissons par cœur, et ils deviennent parfois des paroles vidées de leur sens, de leur vérité et de leur puissance. Nous n’avons plus la conscience aiguë que c’est l’Esprit lui-même qui nous parle, et nous constatons que notre relation avec Dieu  et notre foi tiédissent.

   Prenons l’exemple de la parole de Jésus dans Mt 6, 14-15 : « Si vous pardonnez aux hommes leurs fautes, votre Père céleste vous pardonnera aussi ; mais si vous ne pardonnez pas aux hommes, votre Père céleste ne vous pardonnera pas non plus vos fautes ». Combien de fois avons-nous lu cette exhortation de Jésus, sans que nous réagissions, alors que nous savons que nous n’avons pas pardonné certaines personnes ?

   Imaginez maintenant que Jésus nous apparaisse dans une vision éclatante, et  nous dise exactement la même chose en nous regardant droit dans les yeux. Il y a fort à parier que nous lui demanderions pardon en pleurant, et que nous pardonnerions immédiatement les personnes en question.

   Pourquoi une telle différence d’attitude ? Parce que notre communion avec Dieu est souvent superficielle. Si elle était profonde, l’Esprit nous montrerait qu’il n’y a aucune différence entre le texte écrit et ce que Jésus pourrait nous dire de vive voix. Alors, nous ne la lirions plus sans la mettre en pratique.

   Comment pouvons-nous retrouver une communion vraie et profonde avec Dieu ?

   Il y a un moyen qui comporte deux faces inséparables : la prière de louange et l’obéissance

   En effet, c’est dans la louange que notre communion avec Dieu  peut grandir, car notre regard et notre esprit ne sont plus tournés vers nous, mais vers Lui, pour le louer et l’adorer. Une prière qui se limite à demander des choses à Dieu nous frustrera forcément si nous n’obtenons pas ce que nous avons demandé, et il y a de fortes chances que ce soit le cas, comme l’écrit Jacques : « Vous ne possédez pas parce que vous ne demandez pas. Et quand vous demandez, vous ne recevez pas parce que vous demandez mal, dans le but de satisfaire vos passions » (Jc 3, 2-3). 

   C’est aussi dans l’obéissance que notre communion avec Dieu peut grandir. En effet, c’est l’obéissance librement consentie qui prouve que notre louange est sincère.   

C’est dans le cœur à cœur avec Dieu que nous pourrons être à l’écoute de ce que l’Esprit veut nous dire. Et l’Esprit Saint, dont le seul but est de glorifié Christ (Jn 16,14), nous parlera pour que nos prières, et nos actes glorifient Christ.

   Les prières de demandes et d’intercessions sont parfaitement légitimes. Jésus l’a enseigné dans le Notre Père. Mais elles sont subordonnées à la prière de louange, car alors, notre esprit est en communion avec l’Esprit de Dieu. C’est ce que Jésus vivait lorsqu’il était sur terre. Et il était toujours exaucé (Jn 11,42). C’est ce que l’Esprit nous appelle à vivre, aujourd’hui encore, et chaque jour.

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