Cette fois encore, ce sont les personnages de cette parabole qui m’ont parlé. Nous voilà en présence de 5 sortes de personnes.
Un maître de la loi, un type qui connaît bien la Thorah et qui va s’en servir pour piéger Jésus. Un homme juif, nu et abandonné, laissé pour mort ou en tout cas, bien esquinté ; deux personnes religieuses qui passent leur chemin, un étranger qui s’arrête et prend soin du blessé, et un hôtelier.
Comment ce texte me parle-t-il aujourd’hui ?
D’abord, par exemple, où est-ce que j’en suis dans ma vie ? Puisque « j’ai été créé en Jésus-Christ pour faire des œuvres bonnes », selon Eph 2, 10), faisons ensemble et chacun pour soi une petite révision des 5000 (ou des 50 000, selon notre âge). Rien à voir avec une introspection, invitons le saint Esprit à nous révéler le fond de notre cœur : dans lequel de ces personnages je me reconnais aujourd’hui, 02 août 2025 ?
Suis-je comme ce maître de la loi qui connaît bien la Bible, qui a reçu de bons enseignements mais qui se pose encore des questions sur la vie éternelle ? « Qu’est-ce que je dois faire ? Comment je dois me comporter ? » Oh, je ne cherche pas à piéger Jésus, non, le piège est ailleurs : c’est la foi qui est un piège pour moi ; je crois que Dieu veut me donner la vie éternelle, je le sais avec ma tête, je connais les versets qui en parlent mais cette connaissance ne fait que me condamner puisque je n’ai pas encore accepté la grâce. J’imagine qu’il faut absolument faire des bonnes choses pour être aimé de Dieu et je n’arrive pas à croire que sa grâce seule m’ouvre les portes de son royaume. Et comme je vois bien que les bonnes œuvres ne suffisent pas à changer ma nature, je pense que je suis indigne du royaume de Dieu.
Est-ce que je me reconnais dans cet homme abandonné au bord du chemin, battu par la vie, délaissé par les gens bien-pensants qui passent sans me considérer ? Après tout, je me sens si amoché, si pauvre, si démuni, si dégoûtant que ça ne m’étonne pas que l’on ne m’aide pas ! Je mérite sans doute qu’on me laisse à mon triste sort ! Mon cas est désespéré. Oui, est-ce que j’ai perdu espoir ? Est-ce qu’il y a trop longtemps que je suis par terre, au point que je n’imagine pas pouvoir me relever ? Au point que je me sens indigne mérite mon sort ?
Bien évidemment, j’aimerais, me retrouver dans ce bon samaritain. Celui qui s’est suffisamment décentré de lui pour trouver son prochain. Celui qui n’a pas eu peur du qu’en-dira-t-on et des stéréotypes. Les Samaritains étaient considérés comme des traitres pour les juifs de l’époque. Le bon samaritain n’a pas cherché le passeport du pauvre homme tout nu devant lui, il ne s’est pas dit qu’il n’était pas digne de s’approcher de lui à cause de ses origines, il a écouté son cœur et a soigné avec de l’huile, du vin et des bandes de tissu. Peut-être qu’il a fini son voyage avec un morceau de tissu en moins sur le bas de sa tunique pour faire ces bandages. Ça lui coûte du temps, de l’énergie et des finances, cette histoire. Ce n’est pas rien !
Bon, je suis rassurée, oui, je me retrouve bien dans ce bon Samaritain. J’ai de l’empathie et j’aime prendre soin. Ouf ! Je suis quelqu‘un de bien, finalement. Mais il y a quand même un petit caillou dans ma chaussure ; on me dit souvent que j’en fais trop, que je me mêle de ce qui ne me regarde pas. Est-ce que je sais rester à ma place, seulement à ma place ? Est-ce que c’est toujours la volonté de Dieu qui me pousse à agir ? Je prends soin ou bien je cherche à me rendre indispensable parce que ça me fait du bien ? Est-ce que je sais prendre de soin de moi autant que je sais prendre soin de mon prochain ? Ou bien est-ce que j’imagine que « m’oublier » est un acte de charité ? Et puis mes proches, mes tout proches, mon conjoint, mes enfants ont-ils à pâtir de ce que je donne à mon prochain ? Est-ce que je suis vraiment un bon Samaritain selon la pensée de Jésus ? Ou bien est-ce que je crois que mon identité est dans le sacrifice ?
Il se peut que mon cœur me dise, dans le secret, que je suis de la race des gens religieux de cette histoire, trop affairés pour s’arrêter. Ou trop dégoûtés. Ou trop peureux. Ou trop soucieux de respecter la loi. Parce qu’il ne faut pas oublier que les lévites, les prêtres, n’avaient pas le droit de toucher au sang, ni de s’approcher de la mort. Au point que les familles des lévites sont enterrées au bord des cimetières pour que les prêtres puissent se recueillir en restant à l’extérieur de l’enceinte du cimetière. Selon la loi, on pourrait dire qu’ils ont eu raison de ne pas s’approcher ; il devait y avoir du sang, et de loin ils ne savaient peut-être pas si l’homme par terre était mort ou vivant.
On sait comment Jésus a contrevenu à la loi en guérissant un jour de shabbat, par exemple. « Lequel de vous, si son fils ou son bœuf tombe dans un puits, ne l’en retirera pas aussitôt, le jour du sabbat » (Luc 14,4) avait-il demandé à des maîtres de la loi avant de guérir un homme de sa main. Respecter la loi avec ou sans Jésus, ce n’est pas la même chose.
Si ces prêtres, pour respecter la loi telle qu’ils la comprenaient, ne pouvaient pas s’approcher eux-mêmes, ils auraient pu aller chercher quelqu’un. Ou bien donner de l’argent à quelqu’un pour s’occuper du monsieur. Si je ne suis pas en capacité d’aider concrètement, quel secours, en temps, en argent ou en énergie, puis-je apporter autrement ?
Et n’oublions pas l’hôtelier, lui aussi fait partie de l’histoire. C’est son métier d’héberger, mais pas de soigner. Lui aussi fait un pas de côté pour faire ce qu’on lui demande. Sans doute que la compassion du bon samaritain a été contagieuse, même si les deux pièces d’argent l’ont peut-être aidé à compatir. Cet homme aura des comptes à rendre puisque le Samaritain reviendra. Ça ne coûtera pas d’argent à l’hôtelier, le Samaritain a promis de rembourser les dépenses, mais ça va lui coûter en temps et en énergie. Suis-je, comme lui, quelqu’un à qui on confie les blessés de la vie ? Je ne suis pas en première ligne, mais je suis sollicité. Est-ce que je suis toujours prêt à faire ce pas de côté, à me laisser déranger pour faire ce à quoi je suis appelé ? Est-ce que je sais que j’aurai des comptes à rendre ?
Cette « révision des 5 000 » n’est pas là pour nous condamner ou nous distribuer des lauriers. En tout cas, ce n’est pas comme ça que je l’envisage. C’est un arrêt sur image pour nous aider à grandir dans la foi en rectifiant le tir. Pour nous aider à prier au plus près de ce que l’on vit aujourd’hui, c’est ce que nous ferons à la fin de cette méditation.
De quoi ai-je besoin aujourd’hui pour faire œuvres bonnes ?
Me laisser happer par la grâce comme le maître de la loi ?
Me laisser déranger dans mes convictions par le blessé de la vie comme le religieux ?
Me laisser soigner malgré mon désespoir de moi-même comme l’homme abandonné ?
Me laisser remplir du saint esprit pour continuer à déborder d’empathie comme le bon Samaritain ?
Me laisser bousculer en faisant un pas de côté comme l’hôtelier ?
Toutes ces questions sont faites pour nous ajuster à Jésus qui est notre modèle. Il est le chemin, la vérité, la vie, nous n’arrêtons pas de le dire. Oui, Jésus est le chemin, ici aussi, dans cette histoire du bon Samaritain.
Parce qu’Il n’est pas seulement le bon berger, il est aussi le bon Samaritain. Il s’approche de l’être humain abandonné dans sa misère. Il nous paraît étranger, comme ce Samaritain a dû paraître complètement étranger à ce Juif massacré. Jésus vient du ciel, d’auprès du Père. Mais il s’approche de l’être humain abandonné et Il lui révèle le Père.
Ce n’est pas la religion des religieux qui a apporté du secours à l’homme abandonné. C’est la même chose pour nous : nous ne trouverons pas du secours dans la religion, mais dans la relation avec ce Jésus qui prend soin de nous. Il a donné de sa personne pour prendre soin de nous. Il a quitté sa place, auprès du Père, pour cheminer sur nos chemins d’hommes et de femmes, il s’est fait proche de nous. Il a fait de nous ses prochains. En partageant notre vie terrestre, il a fait de nous ses prochains. Et en ressuscitant, il nous a placés auprès du Père, dans le royaume de son Père où est notre guérison. Il nous donne aussi une communauté de croyants, ici-bas, avec ce qu’il faut pour la guérison : l’huile et le vin. Son Saint-Esprit et son sang. Cette Église vivante n’est pas démunie pour prendre soin des cabossés de la vie. Elle a reçu le saint Esprit et elle fait mémoire du sang de Jésus versé pour nous au travers de la sainte cène.
« Va et toi aussi, fais de même ». C’est la fin de la discussion de Jésus avec cet homme.
Une fin qui ne finit rien, mais qui commence tout. Toute une vie de miséricorde. Jésus n’est pas seulement celui de qui nous recevons l’amour de Dieu et l’amour du prochain. Il est aussi notre vie. Celui qui va vivre en nous cet amour unique.
L’amour du Père en Jésus vers l’être humain abandonné fait que cet être humain ne sera plus jamais abandonné. Il sera toujours accompagné, soigné, même si c’est pour un temps par l’intermédiaire d’un hôtelier.
Le Samaritain compte bien revenir voir où en est la guérison de l’être humain qu’il a confié à un hôtelier en payant de sa poche.
Vous savez que Jésus va venir à nouveau. Il viendra subitement. Il viendra voir où nous en sommes avec les soins qu’il nous a confiés pour l’être humain traumatisé, qui a besoin de guérison.
Son Saint-Esprit et son sang ont une valeur et une efficacité éternelle. Amen.
Prière
Pour les maîtres de la Loi
Seigneur, donne-moi la foi stp ! Je suis d’accord de me laisser happer par ta grâce.
Pour ceux qui se sentent à demi morts ou abandonnés
Seigneur, dis seulement une parole et je serai guéri ! Je suis d’accord de me laisser soigner malgré mon désespoir de moi-même.
Pour les bons Samaritains
Seigneur, merci pour les moyens que tu me donnes pour aider mon prochain. Merci de me donner la sagesse de ne répondre qu’à ton appel. Je veux me laisser remplir du saint esprit pour continuer à déborder d’empathie.
Pour les gens religieux
Seigneur, je te demande pardon ! Change mon cœur et purifie-le. Je suis d’accord de me laisser déranger par les blessés de la vie que Tu me demandes d’aider.
Pour les hôteliers
Seigneur, je suis d’accord de me laisser déranger en faisant un pas de côté. Equipe-moi stp. Je sais que tu donnes ce que tu ordonnes.